Le lecteur en Liberté

Poète Il aura fallu attendre la retraite pour que Bernard, 73 ans, retrouve le plaisir et surtout le temps d’écrire après une longue carrière académique et clinique au CHUV, consacrée notamment au domaine de l’hypertension artérielle. Cet heureux grand-papa a depuis laissé tomber la blouse blanche pour revêtir, selon ses mots, l’habit fleuri du poète. Un habit qui, on le constate en se plongeant dans la petite dizaine de recueils déjà publiés, lui sied à merveille.

Vous avez troqué la blouse blanche contre la plume. Comment passe-t-on de l’hypertension à la poésie?

La poésie m’a séduit bien avant la médecine, dès l’adolescence, mais la différence entre les deux n’est pas si grande: dans les deux cas l’humanisme est au centre, tant le médecin que le poète sont curieux, ils cherchent leur vérité par une approche scientifique pour le premier, en ouvrant au monde ses portes et fenêtres pour le second.

Votre dernier recueil s’intitule Points d’ancrage. Encrer le monde, c’est un peu s’ancrer soi-même?

L’être humain vit dans l’incertitude, le poète en est particulièrement conscient. Il questionne inlassablement et jette l’ancre partout où il peut s’accrocher. Une démarche commune pour beaucoup d’entre nous, qui ne requiert pas nécessairement de passer à l’écriture.

La Liberté est née en 1871. Vous auriez été heureux à cette époque?

Peu avant, en 1870, c’est la publication du premier poème d’Arthur Rimbaud. Sa vie et son œuvre sont traversées par la poursuite de la liberté. J’aurais eu un grand plaisir à le rencontrer et lui aurais demandé d’écrire un poème pour la naissance de La Liberté.

Bernard, qu’est-ce qui, selon vous, était mieux avant?

Je trouve qu’il est souvent plus difficile aujourd’hui pour un jeune de se projeter à long terme dans la vie. Les rapports humains sont devenus plus tendus, on est de plus en plus souvent contraint, sous la pression du temps, de passer à l’orange, voire même au rouge, lorsque le vert se fait attendre.

Et qu’est-ce qui, vous le croyez, sera mieux demain?

Enfin une question facile! La juste place de la femme est maintenant reconnue, ne reste plus qu’à la lui accorder, cette place. Rapidement, dans toutes les têtes et tous les cœurs, je l’espère.

Qu’est-ce qui ne cessera jamais de vous émouvoir?

Le chant du merle.

Votre mot de la fin?

L’éternité. Ae