Dans son discours du 1er Août, votre homologue à l’UDC, son président Marco Chiesa, a accusé les Verts d’être des bobos urbains qui veulent dicter aux campagnes comment vivre. N’est-ce pas un peu le cas?

Balthasar Glättli: Nous, les Verts, sommes le parti des solutions et non de la division. Si l’UDC aspire à être le parti de la division, libre à elle de le faire. Elle part de la vision que seuls ses propres électeurs sont de vrais Suisses. Elle oublie toutefois dans son clivage que près de 60% des Suisses ne vivent ni à la campagne, ni au centre-ville, mais dans les agglomérations. Pour moi, ce n’est pas une attaque contre les Verts, mais contre celles et ceux qui habitent en ville et dans les agglomérations. Si la population nous y élit, c’est parce qu’on prend au sérieux ses besoins.

N’est-il pas paradoxal que les Verts, qui se veulent le parti de l’environnement, cartonnent surtout dans les villes?

Lors des élections communales ce printemps à Fribourg, nous avons multiplié nos sièges par trois, non seulement dans la capitale mais dans tout le canton. Pareil dans le canton de Vaud, où nous avons doublé nos sièges. Lorsque nous luttons pour la biodiversité et la protection des paysages, contre l’UDC, c’est au profit de la qualité de vie dans tout le pays.

Et d’ailleurs, notre candidate au Gouvernement fribourgeois pour les élections de cet automne, Sylvie Bonvin-Sansonnens, n’a pas du tout le profil d’une bobo urbaine, mais celui d’une agricultrice bio qui habite dans un petit village.

Le très probable futur président du PLR, Thierry Burkart, était un opposant à la loi sur le CO2. Le climat politique n’est-il pas en train de tourner en défaveur de la cause climatique?

C’est ma crainte. Sa vision de la politique climatique, c’est le dolce farniente en espérant que la technologie, grâce à la main invisible du marché, résolve tous les problèmes. Si c’est là l’orientation qu’il veut donner à son parti, cela ne facilitera pas la recherche de solutions au parlement, mais cela aurait des conséquences électorales importantes pour le PLR et ne ferait qu’aggraver son déclin. On peut toutefois se transformer en tant que président, comme l’a montré Gerhard Pfister, qui militait lors de sa candidature pour le maintien du terme «chrétien» au PDC et qui, comme président, a archivé ce «C» pour créer le Centre.

Pour vraiment faire avancer la cause climatique, cela ne passe-t-il par l’élection d’un vert au Conseil fédéral?

Nous sommes prêts à assumer cette responsabilité et la revendiquons: pas pour le poids symbolique que représente le poste, mais parce qu’on croit que cela pourrait être un catalyseur pour faire avancer les enjeux environnementaux, en priorité ceux du climat et de la biodiversité. Si nos résultats électoraux de 2019 se confirment, viendra un temps où les autres forces politiques ne pourront plus nous refuser l’accès à la responsabilité gouvernementale.

Un siège au Conseil fédéral en 2023, cela reste donc un objectif prioritaire?

C’est un objectif. Les changements climatiques, ce n’est pas un problème qui concerne uniquement les générations à venir. Ça l’est déjà pour les gens qui vivent aujourd’hui. Je peux comprendre que beaucoup de jeunes soient furieux que la politique ne soit pas capable de trouver les réponses adéquates à ce défi.

Mon rêve de président n’est donc pas de faire élire la première conseillère fédérale verte, mais de pouvoir fêter des solutions ambitieuses qui protègent le climat et répondent à l’aspiration d’une génération qui demande que l’on agisse.

PhC