Fribourg L Imaginez. Vous êtes à Fribourg, vous fermez les yeux et empoignez une canne.

Et maintenant, vous allez à la poste. Voici un des défis auxquels sont parfois confrontées les personnes aveugles ou malvoyantes.

C’est pour leur faciliter la vie que la poste située à l’avenue de Tivoli, près de la gare, a mis en place une infrastructure adaptée. Démonstration avec Pierre Bovigny, malvoyant qui a un résidu visuel.

Lorsqu’il entre dans le hall d’entrée, l’habitant de Vuisternens-en-Ogoz, âgé de 28 ans, tâte le sol avec sa canne et tombe sur une surface en relief: ces lignes dites «de guidage» l’amènent jusqu’à une porte coulissante transparente, qu’il passe sans encombre. 

Pour éviter tout éventuel problème, une bande plus sombre a été ajoutée. «Cela permet d’avoir un fort contraste à la hauteur des yeux pour les personnes malvoyantes, qui savent ainsi qu’il y a une porte», décrit Diana Andrea, membre de la Défense régionale des intérêts de la section Fribourg, au sein de la Fédération suisse des aveugles et malvoyants (FSA).

Au sol, les lignes se finissent par un carré, indiquant qu’il faut s’arrêter. Devant se trouve eneffet un guichet sur lequel il est écrit «information» en braille, indique Pierre Bovigny. Normalement, un employé se trouve derrière, ou a un œil dessus. Ce guichet est aussi adapté aux autres personnes en situation de handicap, qui n’ont ainsi pas besoin de retirer un ticket et d’attendre que leur numéro soit appelé, comme l’assure Laurent Savary, responsable politique et communication pour la Suisse romande au sein de La Poste.

«Très bonne chose» Quelque 21 filiales en Suisse ont déjà été adaptées, selon le porte-parole. Ces travaux ont lieu lors de transformations ou de rénovations. «Les coûts s’élèvent à environ 2000 francs, pris en charge par La Poste. Ce montant peut varier d’un site à l’autre», précise Laurent Savary, qui ajoute que la pose des lignes de guidage a été décidée en collaboration avec la FSA, avec l’aide d’Architecture sans obstacles.

«Ces adaptations sont une très bonne chose. Elles permettent d’avoir un point d’entrée quand on ne connaît pas un endroit», assure Pierre Bovigny.

«Dans un monde idéal, il y aurait des lignes de guidage partout, menant aux endroits stratégiques, et même là, on trouverait encore à se plaindre.

Mais on peut toujours trouver des solutions. Par exemple, j’utilise souvent Google Maps pour me guider. J’ai appris à me débrouiller tout seul quasiment depuis le berceau», assure Pierre Bovigny.

Diana Andrea salue aussi cette adaptation, mais juge qu’il faudrait que les lignes de guidage se prolongent à l’extérieur jusqu’aux trains pour que le concept soit plus efficace.

De telles mesures seront mises en place dans le cadre du projet de réaménagement de la gare, selon Jean-Christophe Emmenegger. Le porte-parole auprès de la ville de Fribourg précise que le but n’est pas de guider les personnes vers les entrées des magasins, mais de leur permettre de déplacer de manière autonome et sécurisée dans les espaces publics, notamment sur la future place de la Gare, l’avenue de la Gare, la rue de Tivoli et l’esplanade de la Poste.

Encore des efforts à faire Diana Andrea estime qu’il reste encore beaucoup de travail, car énormément de bâtiments ne sont pas accessibles: «Ma tâche est de sensibiliser les architectes et les ingénieurs au fait de planifier des travaux en respectant les normes en vigueur et d’accompagner la mise en œuvre pour assurer que la loi sur l’égalité des personnes handicapées soit respectée notamment par les villes, les institutions telles que les hôpitaux et les EMS.» En priorité, elle veut se concentrer sur les transports publics. «Parfois, les chauffeurs de bus ne savent pas que les personnes malvoyantes ou aveugles ont le droit d’avoir une carte d’accompagnement.» Jérôme Gachet, porteparole des Transports publics fribourgeois, précise que cela autorise à avoir un accompagnant (ou un chien) et qu’une seule des deux personnes devra payer un billet. «Nous sensibilisons régulièrement nos contrôleurs et nos chauffeurs à cette question. Cela dit, ils ont beaucoup d’informations et on ne peut pas exclure qu’ils oublient, surtout s’ils ne voient pas souvent une telle carte», dit-il.

Diana Andrea évoque encore les loisirs et la culture. En prévision du championnat du monde de hockey, qui se tiendra en 2026 en partie à Fribourg, la possibilité d’avoir des matches en audiodescription est par exemple étudiée. Et durant un spectacle à Equilibre, il a par ailleurs été possible de toucher les costumes et d’avoir un casque d’audiodescription afin de savoir ce qui se passait sur scène. L